Cette note explicative a pour objet de répondre simplement à la plupart des questions que vous vous posez si vous-même ou l'un de vos proches est porteur d'une lithiase biliaire. Elle ne prétend pas rendre compte de toutes les situations, parfois complexes, tant en ce qui concerne le diagnostic, I ‘évolution, les traitements, leurs risques, etc...
Votre chirurgien et votre anesthésiste sont à votre disposition pour vous fournir des renseignements plus précis ou plus "ciblés".
La lithiase et les voies biliaires
La lithiase biliaire, maladie qui consiste en la présence de calculs (sortes de cailloux de taille et de nombre variables) dans les voies biliaires, est très fréquente.
Les voies biliaires sont constituées de canaux situés dans le foie (voies biliaires intra-hépatiques) qui recueillent la bile sécrétée par le foie et qui se réunissent à la sortie du foie pour former une voie biliaire principale (dont la partie basse est appelée cholédoque).
Cette voie biliaire principale (VBP) s'abouche dans l'intestin, 8 à 10 cm après l'estomac (ce segment d'intestin est appelé deuxième duodénum) par le même orifice que le canal pancréatique, le canal de Wirsung.
Cet abouchement est muni d'un sphincter, le sphincter d'Oddi, petit muscle circulaire, qui le ferme à l'état de repos. La vésicule biliaire, sorte de sac, appendue à la face inférieure du foie, est reliée à la VBP par un petit canal, le canal cystique.
La fonction de la vésicule est de recueillir la bile qui s'écoule de façon continue, de la stocker, de la concentrer et de la délivrer au moment des repas: le passage des aliments déclenche à la fois une contraction de la vésicule et une ouverture du sphincter d'Oddi. Les calculs se forment dans la vésicule par agglomération de cristaux, essentiellement à base de cholestérol dans 80% des cas en Occident. La cristallisation, due à une sursaturation de la bile en cholestérol, est favorisée par la stagnation de la bile dans la vésicule. Mais il n'y a pas de corrélation directe entre le taux de cholestérol sanguin, celui de la bile et la survenue de calculs. Habituellement il n'y a pas de cause précise identifiable.
Toutefois les régimes alimentaires riches en graisse et en sucre, des facteurs génétiques, des facteurs hormonaux, expliquant la prédominance féminine de cette pathologie, ou encore parfois des facteurs médicamenteux sont le plus souvent, au moins en partie, responsables de la constitution de calculs biliaires. Enfin, la lithiase biliaire est souvent le fait d’un trouble de contraction de la vésicule qui souvent plus fonctionnelle.
Quelles en sont les conséquences ?
Le plus souvent ces calculs restent muets, on les dit asymptomatiques; ils n'engendrent aucun trouble et cela de façon indéfinie. On les découvre fortuitement au cours d'un examen motivé par tout autre chose. Parfois ils sont cause de douleurs plus ou moins chroniques, peu intenses, mais gênantes: douleurs sous les côtes, à droite, ou au creux de l'estomac.
A la longue la paroi vésiculaire se sclérose, la vésicule perd de sa souplesse puis ne "fonctionne plus". Cette perte de fonction peut s'installer sans qu'aucune manifestation ne le signale. Surtout, ils peuvent se compliquer de façon brusque ou brutale: colique hépatique ou douleur biliaire, douleur intense et brutale, siégeant au milieu sous les côtes (on désigne souvent l’estomac), souvent nocturne, survenant après un repas, correspondant à un blocage de la vésicule par un calcul, cédant en quelques heures ; cholécystite aiguë, au cours de laquelle la mise sous tension de la vésicule, bloquée, s'accompagne d'une infection de son contenu.
En l'absence de traitement peut alors se produire un abcès, une péritonite, une septicémie... Ce peut être aussi le passage d'un calcul dans la voie biliaire principale (VBP), par le cystique, à l'origine d'un blocage, souvent intermittent du cholédoque se traduisant par un ictère, (une jaunisse), ou alors cause d'une pancréatite aiguë, dont la sévérité peut être extrême.
Ce passage d’un calcul dans la VBP, appelé migration lithiasique, se traduit, lorsqu’il occasionne des douleurs, par des perturbations franches des tests fonctionnels hépatiques (notamment élévation du taux des transaminases dosé dans le sang) qui en signent le diagnostic.
Faut-il traiter toutes les lithiases biliaires ?
Non. Toutes celles, et elles sont nombreuses, qui sont asymptomatiquesne nécessitent aucun traitement (à part de rares exceptions). Des études de suivi à long terme ont montré que 60% environ de ces sujets restaient asymptomatiques pendant des années, toute leur vie. Ainsi, il est recommandé aussi bien par la Haute Autorité de Santé que par les Sociétés Savantes de Chirurgie et de Gastro-Entérologie, et par l’Assurance Maladie, de ne pas opérer ces lithiases asymptomatiques.
En revanche, on considère qu'il faut traiter tous les sujets dont les calculs biliaires ont donné lieu à des signes, essentiellement des douleurs de type biliaire, même s'il n'y a pas eu de complications franches jusque-là. En effet, leur surveillance prolongée a révélé que chez 70% d'entre eux environ, survenaient des manifestations bruyantes ou des complications forçant à intervenir, parfois en urgence, et dans de moins bonnes conditions.
Une surveillance particulière est-elle nécessaire chez les sujets non traités ?
Non, aucun examen n'est justifié en l'absence de survenue de signes (douleur, jaunisse, fièvre...).
La taille et le nombre des calculs ont-ils une influence sur la décision thérapeutique ?
Non, les petits comme les gros, les calculs multiples comme les uniques peuvent se compliquer ou rester muets.
Les médicaments
Les médicaments dissolvants, pris en comprimés, de façon prolongée, 6 à 12 mois, peuvent faire fondre des calculs de cristaux de cholestérol, pourvu qu'ils ne soient pas calcifiés et que la vésicule soit bien fonctionnelle. Lorsque les calculs sont volumineux (diamètre supérieur à 10 mm), il est possible d'améliorer l'efficacité de ce traitement en les fractionnant par des ondes de choc (lithotritie), comme on le fait pour les calculs rénaux.
Au total, environ 50% de l'ensemble des lithiases ainsi traitées, auront disparu à l'issue du traitement, au bout d'un an. Et le traitement interrompu, des calculs se reformeront chez près de 50% des sujets, au fil des ans (puisque les conditions qui avaient présidé à leur formation persistent).
Ces échecs, la mauvaise tolérance digestive des médicaments chez certains, la survenue possible de complications au cours du traitement (migration de fragments de calculs), le coût de l'ensemble font que ce type de traitement est pratiquement abandonné.
La chirurgie
La chirurgie consiste à enlever la vésicule, toute la vésicule, et pas seulement les calculs (cela s'appelle une cholécystectomie). Après avoir "détaché" la vésicule du foie, le chirurgien obture le canal cystique par un fil ou le plus souvent un petit clip, et coagule ou met un clip sur l’artère cystique.
Le chirurgien peut dans certains cas réaliser une opacification du canal cholédoque (appelée cholangiographie). Nous ne pratiquons que rarement ce geste, essentiellement lorsqu’il existe une difficulté technique per-opératoire nécessitant de repérer la VBP.
Cette opération se fait pratiquement toujours par laparoscopie*, c'est-à-dire par quatre incisions de 5 mm ou 10 mm, permettant le passage d'instruments fins dont la manipulation est contrôlée grâce à une optique reliée à une caméra vidéo. Sous anesthésie générale, l‘intervention débute par une insufflation de gaz carbonique (CO2), de façon à soulever la paroi abdominale et à permettre les manipulations instrumentales. Elle dure 30 à 70 minutes selon l'état de la vésicule. Les avantages de la laparoscopie sont notables: absence de grande cicatrice, moindres douleurs postopératoires, récupération rapide.
Néanmoins, elle n'a rien de magique et il s'agit d'une véritable opération. Elle n'est pas toujours possible, ni souhaitable: en particulier les importantes inflammations peuvent la rendre dangereuse, et nécessiter la conversion en chirurgie classique. Mais il s'agit d'une opération très "rodée", que ce soit par une laparotomie (ouverture classique) ou par laparoscopie (appelée aussi cœlioscopie). Les pertes sanguines en cours d'intervention sont minimes, de l'ordre de 5 à 50 ml.
De rares complications et des suites favorables
Les complications sont rares : difficultés de dissection d'une vésicule très modifiée par une inflammation chronique, blessure accidentelle du canal cholédoque (moins de 1%), hémorragie pendant l'intervention (exceptionnelle), infection pulmonaire en postopératoire (moins de 5% des cas) ; écoulement biliaire en post-opératoire, généralement par défaut d’occlusion du canal cystique, hémorragie post-opératoire, constitution d’une collection en lieu et place de la vésicule –surtout après cholécystite aigüe – sont également rares mais peuvent nécessiter une ré intervention.
En fait, la survenue de complications dépend surtout de l'existence de maladies associées mal stabilisées (cœur, poumons...) et/ou d'une forme déjà grave (abcès, péritonite), opérée en urgence. C'est pourquoi il est recommandé d'opérer les lithiases "parlantes" (celles qui occasionnent des troubles), à froid, les risques opératoires et post-opératoires étant alors bien moindres.
Qu’advient-il de la bile après l’ablation de la vésicule ?
Elle n’est plus stockée dans cette sorte de réservoir mais le flux biliaire est préservé : il est plus continu, moins lié aux repas et la bile est moins concentrée. La digestion, en pratique, ne se trouve pas modifiée, d’autant que l’intervention est généralement pratiquée sur une vésicule dont la fonction est altérée, voire nulle. Rarement, cet écoulement biliaire modifié est responsable de selles diarrhéiques, la bile ayant un effet laxatif sur la muqueuse colique.
Les suites opératoires sont donc habituellement simples et brèves, et la recommandation actuelle est de réaliser ces interventions en ambulatoire (entrée le matin et retour au domicile le soir). L'hospitalisation est plus longue en cas de cholécystite aigüe ; et après incision classique (2 à 6 jours). Les suites sont peu douloureuses, surtout après laparoscopie et la plupart des opérés ne prennent pas d'antalgiques au-delà des 24 à 36 premières heures. Il est fréquent de ressentir une douleur modérée dans les épaules, conséquence de l'insufflation de gaz dans l'abdomen.
La reprise des activités habituelles est d'autant plus rapide (aux environs du 7ème jour) que l'opération a eu lieu par laparoscopie. La reprise de l'alimentation se fait le soir même ou le lendemain. Ultérieurement aucun régime alimentaire particulier n'est nécessaire. Les conséquences perceptibles de la cholécystectomie se limitent à une diarrhée (quelques selles molles ou liquides par jour) chez I à 2% des opérés. A distance, le risque de récidive, survenue d'un calcul dans la voie biliaire principale, est très faible, de l'ordre de 1%.
Vous serez revu en consultation vers le 25e jour suivant votre sortie.
Quels examens faire avant l'opération ?
Outre ceux prescrits par l'anesthésiste, quelques examens sont nécessaires pour cerner votre lithiase et ses conséquences. Des travaux menés pendant 10 ans nous ont conduits à limiter ces examens à une échographie classique (qui permet déjà et surtout le diagnostic de lithiase) et à une analyse sanguine. Dans 30% des cas environ, il existe des anomalies échographiques ou biologiques qui permettent de suspecter la présence de calculs de la VBP associés aux calculs vésiculaires.
Pour préciser cela, nous réalisons, en per opératoire immédiat habituellement, une écho-endoscopie*, examen qui fournit une analyse détaillée des canaux biliaires et permet de savoir, pratiquement à coup sûr, s'il y a ou non des calculs dans la VBP. Cela est important car leur présence ne peut être négligée et leur extraction est nécessaire à la guérison définitive. Cette écho-endoscopie, effectuée sous anesthésie générale, consiste à analyser les différentes structures (vésicule, VBP, pancréas) par une sonde d'échographie pour traiter ces calculs de la VBP on choisira parmi les techniques actuellement disponibles : approche endoscopique (sphinctérotomie endoscopique*) avant la cholécystectomie, le plus souvent, parfois extraction au cours de la cœlioscopie, ou encore par laparotomie (pour les importants empierrements).
Bon à savoir
Fumer augmente le risque de complications chirurgicales de toute chirurgie.
Arrêter de fumer 6-8 semaines avant l'intervention élimine ce risque supplémentaire.
Si vous fumez, parlez-en à votre médecin, votre chirurgien et votre anesthésiste ou appelez la ligne Tabac-Info-Service au 3989 pour vous aider à réduire les risques et mettre toutes les chances de votre côté.