Les tumeurs de la vessie sont des tumeurs fréquentes de l’appareil urinaire (plus de 10 000 nouveaux cas diagnostiqués tous les ans en France) qui constituent un ensemble au pronostic hétérogène, d’où une prise en charge spécifique et adaptée à chaque patient et sa tumeur.
Leur fréquence semble en augmentation régulière, en particulier chez les femmes (du fait de l’augmentation du tabagisme féminin) et chez les personnes âgées (du fait de l’augmentation de l’espérance de vie). En dehors du tabagisme qui est le principal facteur favorisant l’apparition de ces tumeurs, il existe des causes toxiques parfois professionnelles (amines aromatiques, industrie des caoutchoucs ou des colorants, peintures industrielles à aérosol …) ou infectieuses parasitaires chroniques (bilharziose) principalement en Afrique de l'Ouest et en Egypte.
L’arrêt de l’intoxication tabagique, constitue bien entendu un élément important de la prise en charge de ces tumeurs.
Les tumeurs de la vessie sont l’expression au niveau de la vessie d’une maladie tumorale de l’ensemble du revêtement (urothélium) des parois du système urinaire qui comprends les cavités pyélo-calicielles, les uretères et la vessie.
La quasi-totalité des tumeurs de vessie est par définition cancéreuse (tumeurs malignes) dont on distingue schématiquement deux groupes à l’évolution et au pronostic très différents :
1 - les tumeurs n’envahissant pas le muscle vésical (TVNIM), auparavant dites « tumeurs superficielles »
2 - les tumeurs envahissant le muscle vésical (TVIM), qui infiltrent plus profondément l’épaisseur de la paroi, auparavant appelées « tumeurs infiltrantes ».
Les premières (TVNIM) présentent un double risque : le risque de récidive après leur ablation et/ou le celui de progression en tumeurs plus infiltrantes : leur traitement vise à prévenir ce double risque tout en préservant autant que possible la vessie.
Les secondes (TVIM) sont à risque d’évolution régionale et métastatique. Leur traitement peut nécessiter l’ablation de la vessie (cystectomie) et poser alors la question de la reconstruction d’un réservoir vésicale (néo-vessie).
Comment prend-on en charge initialement les tumeurs de vessie ?
Le premier temps fondamental est la résection de la tumeur lors d’une cystoscopie au bloc opératoire. En fonction du volume tumoral, l’intervention est réalisée en hôpital de jour (chirurgie ambulatoire) ou au cours d’une hospitalisation de 48 h. Cette intervention est à la fois diagnostique et parfois thérapeutique par elle-même.
Elle permet de retirer la tumeur visible et d’évaluer de nombreux paramètres pronostiques (aspect, taille, localisation et nombre de lésions).
La tumeur est ensuite analysée par des anatomo-pathologistes spécialisés afin de classer son type, son extension et son grade.
Un scanner est également prescrit pour rechercher une possible association de ces tumeurs à une autre localisation tumorale dans le système urinaire (uretères ou cavités rénales).
Et ensuite ?
1. Lorsque la tumeur est « superficielle », elle n’envahie pas le muscle vésical (détrusor). Si elle est de bas grade (faible agressivité potentielle) une surveillance est en générale proposée, basée sur la cytologie des urines (recherche de cellules cancéreuses dans les urines) et de cystoscopies répétées, car le risque en est la récidive, fréquente, et éventuellement la progression vers une tumeur infiltrant le muscle.
Lorsqu’elles sont d’agressivité plus importante (haut grade), le risque de récidive et de progression en une tumeur infiltrantes le muscle est beaucoup plus élevé. Pour prévenir cette évolution il peut être nécessaire d’effectuer des instillations vésicales. Ces instillations consistent à mettre en place, lors d’une consultation ou d’une hospitalisation ambulatoire, une sonde vésicale afin de remplir partiellement la vessie avec des produits cytotoxiques (mitomycine) ou stimulant les défenses immunitaires (suspension de BCG). Ces instillations permettent de diminuer la fréquence de récidive de cette maladie.
Cette attitude conservatrice concerne environ 80% des tumeurs de la vessie.
2. Lorsque la tumeur infiltre le muscle vésical, que ce soit d’emblée ou conséquence de l’évolution de la situation précédente, ou bien encore que l’on craigne que cela arrive rapidement –tumeur agressive résistante aux instillations -, il s’agit d’une maladie cancéreuse grave pour laquelle la rapidité et la qualité du traitement sont les meilleurs éléments du pronostic à long terme. Le risque est le développement de la tumeur en profondeur (évolution locorégionale) et générale (évolution métastatique).
On pratique alors un bilan d’extension par imagerie (scanner du thorax et de l’abdomen et parfois une scintigraphie osseuse).
En l’absence de métastase, l’expérience du groupe hospitalier est de proposer dès que possible un traitement préopératoire par chimiothérapie -on parle de chimiothérapie néo-adjuvante,- afin d’augmenter le taux de guérison (survie sans récidive). La chimiothérapie est prise en charge au sein du GH Diaconesses-Croix Saint-Simon par l’équipe d’Oncologie Médicale qui a une expertise forte dans ce domaine.
Ce traitement est suivi d’une ablation de la vessie (cystectomie) avec un curage très étendu des aires ganglionnaires qui drainent la vessie et dont la qualité est un élément important du pronostic. Cette ablation de la vessie est d’une intervention complexe dont la qualité technique doit être irréprochable ce qui justifie une prise en charge par des équipes expertes.
Chez l’homme la cystectomie est toujours associée à l’ablation de la prostate, on parle de cysto-prostatectomie radicale. La préservation de la prostate est associée à un risque plus élevé de récidive et cette technique est aujourd’hui abandonnée.
Chez la femme, la cystectomie peut être associée à une hystérectomie et à la résection partielle du vagin en fonction de la localisation de la tumeur. Toutes les fois que cela est possible, la préservation de l’utérus et du vagin est privilégiée.
Après l’exérèse du réservoir vésical, la question est celle de la reconstruction de l’appareil urinaire.
Toutes les fois que c’est médicalement possible (il s’agit de la grande majorité des cas) et aussi bien chez l’homme que chez la femme, nous proposons une reconstruction du réservoir vésical à l’aide d’un segment du tube digestif –on parle d’entero-cystoplastie- qui permet d’uriner par les voies naturelles sans sonde ni poche sur la peau.
Parfois et pour différentes raisons, nous pouvons être amenés à réaliser une dérivation urinaire à la peau (stomie urinaire). Dans ce cas, soit les urines s’écoulent directement (dérivation cutanée urinaire dite ‘non-continente’). dans une poche de recueil spéciale qui est collée en permanence sur l’abdomen du patient, soit le patient doit drainer lui-même un réservoir interne également confectionné en intestin (dérivation cutanée urinaire dite ‘continente’). Dans ces cas, l’équipe de stomathérapie du GH Diaconesses Croix Saint-Simon vous prendra en charge pour vous apprendre ces nouveaux gestes de la vie quotidienne de façon à ce que vous soyez totalement autonome.
Ces interventions complexes sont réalisées par coeliochirurgie avec assistance robotique (systèmes) ou voie conventionnelle. Notre expérience en chirurgie peu invasive nous permet de pratiquer cette intervention dans le but de la rendre moins agressive et de faciliter les suites opératoires et la convalescence. Le choix entre les techniques opératoire se fait en fonction des caractéristiques du patient et de sa tumeur en privilégiant toujours la qualité curative du geste.
Dans tous les cas, la décision thérapeutique est prise au cours d’une Réunion de Concertation Pluridisciplinaire. A laquelle assistent tous les praticiens impliqués dans le traitement du cancer de la vessie : urologues experts, oncologues médicaux, radiothérapeutes et anatomo-pathologistes
En fonction des conditions, ce schéma thérapeutique peut être modifié et différents autres protocoles peuvent être discutés.
Pour en savoir plus :
En français : Le site de l’Institut National du Cancer
En anglais : Le site du National Cancer Institute