Hernie inguinale

Cette note explicative a pour objet de répondre simplement à la plupart des questions que vous vous posez. Elle ne prétend pas rendre compte de toutes les situations, parfois complexes, tant en ce qui concerne le diagnostic, l'évolution, les traitements, leurs risques, etc.

De quoi s'agit-il ?

Il s'agit de l'issue, à travers un orifice naturel de la paroi abdominale, d'une partie du contenu de l'abdomen (frange de graisse, intestin ...). Cet orifice naturel qui laisse passer les éléments qui vont au- ou qui viennent - du testicule (chez l'homme) a en fait une conformation de chenal tracé en chicane dans l'épaisseur de trois muscles. La hernie apparaît lorsque l'effet de chenal en chicane s'efface. La pression intra-abdominale, très élevée au cours des efforts, souffle alors le péritoine, écarte les muscles les uns des autres.

L'orifice herniaire est alors constitué, la hernie persistera, se reproduira indéfiniment (à part quelques exceptions de l'enfance). 

Quels sont les risques ?

Ils sont de deux ordres. Le plus fréquent, quasi-inéluctable tient à la pérennisation de la hernie et à son accroissement progressif, source de gêne locale, entravant la vie quotidienne, la marche... Mais cette évolution se produit de façon très variable, en quelques mois ou quelques dizaines d'années. Le deuxième risque, plus rare, et assez peu prévisible est celui de l'étranglement. Il s'agit de l'incarcération d'un segment d'intestin, "coincé" dans l'orifice herniaire, par un oedème qui interdit le retour dans l'abdomen. C'est généralement très douloureux et cela nécessite une intervention en urgence pour limiter les dégâts intestinaux. En règle générale, c'est l'existence de ces deux risques qui conduit à traiter toutes les hernies, même lorsqu'elles sont peu gênantes.

Quel est le traitement ?

Le seul traitement possible est chirurgical. Il consiste à obturer l’orifice musculaire qui laisse passer la hernie : soit en fermant l’orifice avec du fil (appelée « raphie ») soit en interposant sur l’orifice une prothèse (encore appelée « plaque », « toile », « treillis ») qui fait donc office de « rustine ».

Le port de bandage, dans le meilleur des cas, ne fait que limiter le volume de la saillie, ne résout pas le problème. Il est souvent source d'inconfort, parfois de complications. Il ne constitue donc qu'une solution d'attente, parfois un pis-aller.

Les techniques au fil : la plus connue est l’intervention de shouldice (cf fiche spécifique) réalisée en faisant une petite ouverture au niveau de l’aine :

Les techniques avec prothèse : la prothèse peut être placée soit par une ouverture inguinale (intervention de Lichtenstein, prothèse PHS° en forme de diabolo), soit par un abord en coelioscopie (en introduisant une caméra au niveau du nombril).

L'opération de Lichtenstein

Il s’agit de donner de l'étoffe aux muscles que l'on coud en reconstituant la paroi abdominale. C'est une sorte de « rapiéçage » qui utilise une petite pièce de ces fameuses « plaques ».L'objectif en est de diminuer et même de rendre pratiquement nulle la tension exercée sur les muscles lors de la réparation pariétale. De la sorte, les suites opératoires sont moins douloureuses. Le Dr Lichtenstein a laissé son nom à cette réparation « tension-free » (sans tension en français). L’intervention peut être réalisée sous anesthésie générale ou sous anesthésie locale.

La réparation par cœlioscopie

L’intervention nécessite une anesthésie générale et dure environs 30 minutes. Il n’y a pas d’ouverture au niveau de l’aine mais l’opérateur réalise une cœlioscopie en s’introduisant dans l’abdomen par 3 petites incisions réparties sur le ventre (cf fiche spécifique).

Le principe est d’interposer une prothèse en arrière de l’orifice herniaire, situation la plus physiologique pour une réparation herniaire. La prothèse est le plus souvent simplement posée, la pression intra-abdominale venant la plaquer sur les muscles.

Quelle opération choisir ?

Il est désormais acquis que la réparation d’une hernie chez l’adulte se fait en utilisant une prothèse. Les progrès de l’industrie chimique ont permis de rendre ces matériaux prothétiques parfaitement intégrables par rapport au corps humain et les réactions de « rejet », sauf surinfection de la plaque, n’existent plus.

La technique de shouldice (réf.1), qui a été jusque dans les années 1980 la meilleure technique de réparation par abord direct sans utilisation de prothèse avec un taux de récidive de 6,1% à 8,5 ans, est abandonnée par de nombreuses équipes. En effet, la relative tension imprimée sur la paroi était source de récidives et d’inconfort post-opératoire plus important par rapport aux techniques avec prothèses (réf. 2). Le concept de réparation sans tension a ainsi écarté la plupart des réparation par raphie simple au profit de l’utilisation de prothèses, l’intervention de lichtenstein occupant avec le « plug » herniaire l’essentiel des techniques dites « ouvertes », c’est à dire en ouvrant au niveau de l’aine (réf. 3). Une revue systématique d’essais contrôlés réalisée en 2003 montrait un net avantage des techniques prothétiques par rapport aux techniques non prothétiques (spécialement avec le Shouldice) en termes de récidive herniaire et de douleurs chroniques (réf. 4)

Les techniques laparoscopiques représentent les approches les plus récentes en matière de hernie de l’aine. Elles ont notre préférence du fait de la qualité des suites post-opératoires.

En termes de récidive herniaire, les réparations avec prothèse, par abord inguinal ou coelioscopique ont les mêmes résultats (réf. 7). Il semble se dégager un bénéfice en termes de confort post-opératoire en faveur de la cœlioscopie par rapport à la voie ouverte (réf. 8).

Le traitement chirurgical des hernies de l’aine fait encore l’objet de nombreux travaux de recherche clinique. Nous retranscrivons les principales conclusions et recommandations de niveau A (niveaux de preuves basés sur des essais contrôlés à effectifs homogènes) issues de la EHS (European Hernia Society) publiées en 2009 et mises à jour en 2014 (réf. 5 et 8) :

  • les procédés utilisant une prothèse donnent moins de récidives que les procédés sans prothèse. Recommandation : tous les patients adultes (>30 ans) porteurs d’une hernie inguinale symptomatique devraient être opérés par une technique prothétique
  • l’intervention de shouldice est la meilleure des réparations sans prothèse
  • les techniques coelioscopiques par rapport à la technique de Lichtenstein donnent moins d’infections de paroi et d’hématome, permettent un retour plus rapide aux activités quotidiennes et au travail
  • la réparation prothétique semble réduire les risques de douleur chronique plutôt que les augmenter. Les techniques coelioscopiques de pose de prothèse donnent moins de douleurs chroniques et d’hypoesthésie que la technique de Lichtenstein. A long terme (plus de 3 ou 4 ans de suivi), ces différences (pas de prothèse- coelioscopie-Lichtenstein) semblent s’atténuer pour la douleur mais pas pour l’hypoesthésie

Points forts :

  • Les hernies inguinales de l’adulte doivent être réparées avec interposition d’une prothèse
  • La laparoscopie donne de meilleures suites fonctionnelles immédiates par rapport à la voie ouverte

Quelles sont les suites post-opératoires ?

Chaque fois que possible, la cure de hernie inguinale est réalisée en ambulatoire : vous entrez le matin à jeun et vous sortez en fin de journée après un examen médical et à la condition d’être accompagné et ne pas être seul à son domicile la première nuit suivant l’intervention.

L’objectif du traitement est de faciliter au plus vite la reprise des activités physiques : les activités professionnelles, s'il ne s'agit pas d'un travail de force, peuvent reprendre vers le 7e jour, les activités physiques de fond vers le 15e jour, la solidité définitive n'est acquise que vers 2 à 3 mois pour les techniques non coelioscopiques. La cœlioscopie permet de récupérer une activité physique et sportive dès la première semaine.

Les complications sont rares: hématome local, infection locale (moins de 1% en technique « ouverte », quasi-nul en cas de cœlioscopie), douleurs locales persistant quelques semaines ou mois (environ 1%). Plus exceptionnelle encore (2 à 3 pour 1000 opérations), une phlébite du cordon spermatique, thrombose de la veine du testicule, qui peut résulter en une atrophie testiculaire. Son risque est d'autant plus élevé que la hernie est plus volumineuse, descendant dans la bourse, nécessitant une dissection étendue, ou qu'il s'agit d'une récidive, de dissection toujours plus délicate. La réalisation d’une cœlioscopie expose a des complications rarissimes mais potentiellement graves : perforation d’intestin, plaie vasculaire et embolie gazeuse.

La cœlioscopie a 2 particularités post-opératoires :

  • la survenue fréquente d’hématomes sous-cutanés. Ils se constituent entre J1 et J4, peuvent s’étendre aux bourses et même à la verge. Ils ne nécessitent aucun traitement spécifique, disparaissent toujours en moins d’un mois sans conséquence fonctionnelle
  • la survenue d’un « sérome » : il s’agit d’une « boule » dure, en lieu et place de l’ancienne hernie, pouvant même faire penser que la hernie a récidivé. Ce sérome correspond à un épanchement de liquide dans l’ancienne zone occupée par la hernie et survient dans presque 30% des cas. Il ne nécessite aucun traitement et disparait en plusieurs semaines.

Quelle que soit la technique utilisée, à distance, après plusieurs mois, la persistance de douleurs inguinales est observée chez environ 1% des opérés. Elles sont rarement le fait d'une complication locale, plus souvent liée à une pathologie musculo-tendineuse pré existante (tendinite).

Enfin, les récidives de hernies sont rares, surtout après utilisation de prothèses. Leur fréquence varie de 0.1 à 3% à 3 ans. Elles seraient liées à une rétraction secondaire de la prothèse. Leur traitement est plus délicat.

Rendez-vous
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Références bibliographiques    :                                                                                                                                                                   

1- Hay JM et al ; Shouldice inguinal hernia repair in the male adult : the gold standard ? A multicenter controlled trial in 1578 patients. Ann Surg 1995 ;222 :719-27
2- Amato B et al. Shouldice technique versus other open techniques for inguinal hernia repair. Cochrane database Syst Rev 2012 ;18 ;4 :CD001543
3- Agresta F et al. Inguinal hernia repair in  a community hospital setting- have attitudes changed because of laparoscopy ? a review of a general surgeon’s experience over the last 5 years. Surg Laparosc Endosc Percutan Tech 2009 ;19(3) :267-71
 4- Bittner R et al. Comparison of endoscopic techniques vs Shouldice and other open non-mesh techniques for inguinal hernia repair : a meta-analysis of randomized controlled trials. Surg Endosc 2005 ; 19 :605-615
5- Simons MP et al. European Hernia Society guidelines on the treatment of inguinal hernia in adult patients. Hernia 2009, 13, 343-403
6- Treadwell J et al. Surgical options for inguinal hernia : comparative effectiveness review (internet). Rockville (MD) : Agency for Healthcare Research and Quality (US) ; 2012 Aug. Report No : 12-EHC091-EF
7- Yang J. Laparoscopic or Lichtenstein for recurrent inguinal repair : a meta-analysis of randomized controlled trials. ANZ J Surg 2013 ;83(5) :312-8
8- Miserez M et al. Update with level 1 studies of the European Hernia Society guidelines on the treatment of inguinal hernia in adult patients. Hernia 2014, 18, 151-163

Bon à savoir

Fumer augmente le risque de complications chirurgicales de toute chirurgie.
Arrêter de fumer 6-8 semaines avant l'intervention élimine ce risque supplémentaire.
Si vous fumez, parlez-en à votre médecin, votre chirurgien et votre anesthésiste ou appelez la ligne Tabac-Info-Service au 3989 pour vous aider à réduire les risques et mettre toutes les chances de votre côté.