Cette notice est destinée à fournir aux futurs opérés et à leur entourage quelques explications simples sur les opérations le plus souvent pratiquées. Elle ne saurait être exhaustive et rendre compte de toutes les situations : nombre d’entre elles sont particulières, spécifiques et des explications plus personnelles vous seront alors fournies par les médecins qui vous prennent en charge.
Situation
Le pancréas est une glande située en profondeur dans l’abdomen, un peu au-dessus de l’ombilic, allongée de bas en haut, de droite à gauche, barrant ainsi presque tout l’abdomen, en croisant la colonne vertébrale. Profond, il est intimement uni à plusieurs organes fixes : le duodénum (première partie de l’intestin grêle, faisant suite à l’estomac), la voie biliaire principale (= cholédoque) qui creuse une gouttière à sa face postérieure, la veine porte (grosse veine qui draine tout le sang de l’intestin et se jette dans le foie), et à sa partie gauche, la rate.
Si on lui décrit plusieurs parties, en fait c’est un organe plein et continu : la tête, incluse dans le cadre duodénal (on dit comme un pneu dans sa jante), qui mesure 6 à 7 cm de haut et 4 de large ; l’isthme est plus étroit et se prolonge par le corps du pancréas, long de 8 à 10 cm, haut de 4, prolongé par la queue longue de quelques centimètres et venant plus au moins au contact de la rate. L’ensemble a ainsi une longueur de 15 à 20 cm environ.
Les sécrétions pancréatiques sont recueillies dans des canaux qui se jettent dans un canal principal, le canal de Wirsung, qui parcourt toute la glande, de la queue à la tête, pour s’aboucher dans le duodénum, par le même orifice que le cholédoque (papille duodénale).
Pancréas : situation générale (Le pancréas est situé en arrière de l’estomac. Il est représenté ici au premier plan en surimpression.)
A quoi sert le pancréas ?
C’est une glande qui secrète à la fois un liquide se déversant dans le duodénum, contenant de nombreux enzymes destinés à permettre la digestion des aliments ingérés (c’est la fonction exocrine du pancréas), et à la fois des hormones qui passent directement des cellules sécrétrices dans le sang (c’est la fonction endocrine). La plus connue de ces hormones est l’insuline, chargée, comme chacun sait, de réguler la glycémie (le taux de sucre dans le sang). Le défaut d’insuline (divers mécanismes peuvent en être la cause) est responsable du diabète. Le pancréas sécrète bien d’autre hormones, ou substances équivalentes : glucagon, somatostatine, VIP...
Ses fonctions sont donc essentielles, mais lorsqu’elles sont défaillantes (le fait d’une maladie ou d’une opération ayant emporté une partie ou la totalité de la glande), elles peuvent être compensées par : l’apport d’enzymes par voie orale en même temps que l’alimentation, des injections d’insuline en cas de diabète. Les transplantations du pancréas, possibles, ne s’adressent qu’à des cas très particuliers.
La connaissance de ces deux fonctions sécrétoires du pancréas permet de comprendre la survenue de maladies assez particulières que sont :
- assez fréquentes, les pancréatites aiguës, sortes d’attaques du pancréas par ses propres enzymes qui le « digèrent »,
- rares, des tumeurs sécrétant les hormones produites à l’état normal par la glande.
Les maladies pancréatiques qui conduisent à des opérations.
Deux types de maladies, fort différentes, peuvent nécessiter un geste chirurgical : des tumeurs, des pancréatites.
Les tumeurs
Les tumeurs du pancréas sont par ordre de fréquence, surtout des cancers (le plus habituel est un adénocarcinome : nom du type histologique), surtout de la tête du pancréas. D’autres tumeurs de la région lui sont assimilées, sur le plan chirurgical : tumeurs de la papille duodénale, du bas cholédoque notamment. Mais il y a bien d’autres lésions tumorales, bénignes, pré cancéreuses ou cancéreuses : les TIPMP (tumeur intra canalaire papillaire et mucineuse), sortes de kystes développés à partir des canaux pancréatiques, susceptibles pour certains de dégénérer ; des kystes mucineux (nom savant : cystadénome mucineux) : des tumeurs endocrines, sécrétant ou non des hormones ; et de nombreuses autres lésions, nettement plus rares.
Comment se manifestent – elles ? Hormis les tumeurs endocrines sécrétantes, repérées par la sécrétion inappropriée d’hormone, les lésions du pancréas n’ont pas de symptôme propre. C’est par leur retentissement sur les organes voisins qu’elles se signalent : compression du duodénum gênant l’alimentation, compression du canal cholédoque responsable d’ictère (=jaunisse), compression de nerfs profonds source de douleurs. Parfois il s’agit de diabète, l’obstruction du canal de Wirsung par la tumeur entraînant une souffrance de la glande située en amont de l’obstacle. Rarement, et il s’agit là également d’un symptôme propre à la glande, le blocage de la sécrétion exocrine (donc d’enzymes) cause une diarrhée par défaut d’absorption des nutriments.
Les pancréatites
Les pancréatites aiguës ne se traitent pas chirurgicalement. Cependant, la survenue de certaines complications peut conduire à une opération. Il s’agit surtout d’évacuer des collections infectées, sorte d’abcès pancréatiques (ou péri pancréatiques).
Les pancréatites chroniques ne font également l’objet d’opérations que lorsqu’elles se compliquent : apparition de faux kystes persistant (sortes de collections de liquide pancréatique), compression de la voie biliaire (jaunisse), du duodénum ; rarement douleurs chroniques invalidantes. Le type d’opération à entreprendre dépend donc du (ou des) type(s) de complication(s) et pas de la nature de la maladie elle-même dont le traitement de « base » est d’ordre médical.
Aperçu des principales opérations pancréatiques.
I – Les résections
Les résections consistent à enlever une partie de la glande (très rarement la totalité). Les deux plus fréquemment pratiquées concernent la tête du pancréas (opération appelée duodéno-pancréatectomie céphalique ou DPC) ou le corps et la queue (pancréatectomie gauche).
La DPC : opération majeure, elle enlève en bloc un carrefour d’éléments solidaires, intimement unis : -le duodénum, -la tête du pancréas, -le canal cholédoque,
Mais aussi la vésicule biliaire (qui risque de s’infecter si on la laisse en place), et souvent le tiers distal de l’estomac (appelé antre). L’exérèse (ablation) est suivie d’un temps de reconstruction visant à « rabouter » au tube digestif (l’intestin grêle) les structures sectionnées. Le montage le plus habituel raccorde d’abord le pancréas, puis le canal biliaire, enfin le duodénum situé immédiatement après l’estomac (ou l’estomac si une partie en a été retirée).

Sa durée va de 4 à 6 heures, selon les difficultés locales ; une transfusion sanguine peut être nécessaire, surtout en cas d’anémie pré opératoire. Dans les suites opératoires, une sonde est toujours laissée en place dans l’estomac (passant par le nez), pour une période de quatre à huit jours. L’alimentation par la bouche n’est reprise que lorsque les fonctions intestinales sont rétablies.
Parfois, notamment si l’état nutritionnel pré opératoire est altéré, une sonde est placée pendant l’opération dans l’intestin grêle pour permettre la reprise rapide (J1 ou J2) d’une alimentation (autre que par voie veineuse). La complication essentielle de cette chirurgie majeure, réservée à des services entraînés, est liée aux multiples sutures digestives, spécialement à la suture unissant le pancréas à l’intestin grêle. Son défaut de cicatrisation (responsable d’une fistule anastomotique), observée dans près de 10% des cas dans les grandes séries de la littérature médicale, y compris récentes, peut être cause d’infections locales, de ré interventions pour drainage.
La mortalité liée à cette opération a considérablement baissé depuis 20 ans, est située maintenant au-dessous de 5%, et reste fortement liée au terrain, c'est-à-dire à l’existence de pathologies associées (cœur, poumons..), au grand âge. A distance, elle permet de mener une vie normale, d’avoir une alimentation normale (presque toujours avec une supplémentation, par des comprimés, en enzymes), ne déclenche pas de diabète (sauf si le pancréas laissé en place était lui aussi malade, comme dans une pancréatite chronique par exemple).
Les pancréatectomies gauches sont plus ou moins étendues, et fonction de la taille et de la situation des lésions à retirer. Elles emportent ou non la rate, dont la conservation est souhaitable, mais par toujours possible. La tranche de section pancréatique est suturée mais non raccordée à l’intestin, ce qui élimine le risque décrit plus haut de fistule anastomotique. Néanmoins, une fuite, isolée, de liquide pancréatique peut s’extérioriser, mais ses conséquences sont beaucoup moins graves (puisqu’il n’y a pas d’ouverture intestinale, source d’infection).
D’autres résections sont possibles, peu fréquemment réalisées : - résection centrale laissant en place la tête et la queue du pancréas, - énucléation d’une tumeur bénigne, sans enlever la glande voisine.
II – Les dérivations
Les dérivations ne sont pas (sauf exception décrite plus loin) des interventions pancréatiques, mais des gestes réalisés pour dériver, libérer des organes voisins du pancréas dont la fonction est entravée par la lésion du pancréas. Ainsi une compression du cholédoque peut être traitée par une dérivation de la voie biliaire dans l’intestin ; idem pour l’estomac.
Un faux – kyste (collection organisée péri pancréatique) peut aussi faire l’objet d’une dérivation intestinale. Indiquée au cours de l’évolution de quelques pancréatiques chroniques, la dérivation du canal de Wirsung consiste à fendre de canal, dilaté par la maladie, sur une grande étendue, 8 à 10 cm, et à en coudre les berges sur un segment d’intestin grêle.


Les indications des opérations sont posées en tenant compte de nombreux éléments :
- la nature de la maladie (tumeur maligne ou non..),
- son degré d’extension. Enlever partiellement une tumeur maligne n’apporte pas de bénéfice. Dans ces cas, il vaut mieux recourir à des gestes endoscopiques (pose d’une prothèse dans le canal biliaire pour assurer sa liberté), parfois à des dérivations chirurgicales, souvent maintenant à une chimiothérapie, une radiothérapie, ou l’association des deux.
- l’âge du patient, ses maladies associées.
Les médecins qui vous prennent en charge vous expliqueront les raisons et motivations du ou des traitements qu’ils vous proposeront.
Bon à savoir
Fumer augmente le risque de complications chirurgicales de toute chirurgie.
Arrêter de fumer 6-8 semaines avant l'intervention élimine ce risque supplémentaire.
Si vous fumez, parlez-en à votre médecin, votre chirurgien et votre anesthésiste ou appelez la ligne Tabac-Info-Service au 3989 pour vous aider à réduire les risques et mettre toutes les chances de votre côté.